Dès les années 1990, les premières politiques de numérisation du patrimoine ont été lancées. Leurs objectifs : préserver les collections, favoriser la recherche et donner un accès plus large à des fonds jusqu’alors invisibles. Les musées ont aujourd’hui prit la mesure des possibilités qui leur sont offertes par les technologies numériques et s’emparent de ces nouveaux outils. En 2010, les musées français étaient 63% à posséder leur site et en 2012 ce chiffre monte à 81%. Informations pratiques, communication des évènements et promotion des collections : pour qu’un musée existe il faut désormais qu’il crée son propre site web. Parmi eux, le site de Beaubourg : le « Centre Pompidou Virtuel » dont la nouvelle interface, lancée en 2012, se veut particulièrement inédite.
Capture d’écran : page d’accueil du site web du Centre Pompidou.
Une « navigation par les sens »
Le site web du musée s’articule en différentes rubriques qui structurent et organisent la visite de l’internaute, faisant également référence à la pluridisciplinarité de l’institution. Ces rubriques sont accessibles depuis la barre de menu, en haut. Sur la page d’accueil, le site expose directement des oeuvres numérisées, issues des expositions temporaires et permanentes qui font office de de liens vers les informations relatives aux expositions. Le fond clair, les images disposées simplement en un rectangle central et le peu de texte permettent au spectateur une visite rapide et facile, de « créer son propre parcours » à l’intérieur même du site. Lors du lancement du nouveau site web du musée en 2012, Alain Seban disait en effet vouloir créer un site web sur lequel le visiteur navigue « par les sens », de façon simple et intuitive. La présentation de la page d’accueil (et de l’ensemble du site) font ainsi le choix « d’une grande sobriété graphique qui favorise la lisibilité ».
On distingue donc quatre entités distinctes qui composent la page d’accueil : la barre de menu, qui permet de naviguer dans le site ; l’espace personnalisé, à gauche ; le rectangle d’images présentant les évènements du musée, au centre de la page ; et enfin, en bas, l’espace des mécènes et des sites attenants au centre tels que celui de la Bpi, du Centre Pompidou de Metz ou encore de l’IRCAM.
À propos du Centre Pompidou : connaître et comprendre l’institution
La première rubrique – figurant dans la barre de menu – concerne l’histoire de l’institution et sa stratégie en terme de diffusion d’art contemporain. Cette rubrique à l’avantage de retracer l’histoire d’un lieu, d’en faire connaitre ses origines, son programme premier mais aussi son organisation détaillée actuelle, ses stratégies et ses projets. Le tout est présenté dans une sorte de « menu déroulant » « en accordéon » avec des rubriques et multiples sous rubriques, simple d’utilisation, facilement consultable.
A l’intérieur même de cette rubrique, un onglet est spécialement dédié à la recherche et à la formation. Section qui s’adresse donc directement à un public spécialisé ciblé. Celui-ci présente, entre autre, les publications internes au Musée National d’Art Moderne, l’accès à la lecture partielle de certains cahiers, une consultation de tous les numéros disponibles, la commande d’ouvrages en ligne. On y trouve également une section dédiée à la recherche avec l’actualité des bourses d’étude mises en place par l’institution, ainsi qu’un lien vers l’une de ces études : Histoire des expositions.
La rubrique se dote également d’un espace professionnel, référençant toutes les informations nécessaires aux divers métiers en lien avec le musée, notamment les professionnels du tourisme, les marchés publics (un espace de consultation des appels d’offres) ou encore l’événementiel (lien vers la location d’espace). Là encore, le musée s’adresse à un public ciblé : non plus seulement aux simples visiteurs, mais également aux professionnels désirant travailler avec l’institution (avec une section consacrée aux offres d’emplois et de stages) et aux chercheurs.
Dans cette première et assez vaste rubrique, le Centre Pompidou est donc présenté dans son ensemble, de son histoire et son évolution à ses problématiques actuelles, de son organisation à ses offres professionnelles en passant par ses publications. La rubrique est simple, présentée dans un menu en accordéon, et les outils numériques utilisés sont relativement peu nombreux (quelques vidéos, dossiers pédagogiques). Enfin, le public ciblé est assez varié : étudiants, professeurs ou chercheurs mais aussi amateurs ou touristes (le site est traduit en anglais et en espagnol).
Des services personnalisés et des ressources gratuites
« Le site est le point d’entrée dans un écosystème complet, couplant l’accès à des ressources gratuites et à des services personnalisés ». Alain Seban.
La seconde rubrique proposée sur le site web dans la barre de menu, s’attache à simplifier l’organisation ou la planification de la visite de l’internaute au Centre Pompidou. Elle propose de nombreux liens et outils d’informations permettant d’anticiper la venue au centre afin de la rendre la plus simple et agréable possible. Dans la volonté de toucher tous les publics et rendre l’art plus accessible, le site met aussi en place des sections « publics spécifiques » permettant d’élargir à nouveau le spectre des visiteurs, notamment à un public handicapé.
Capture d’écran : Centre Pompidou public handicapé, page d’accueil.
Par ailleurs, le site met à dispositions des ressources afin de préparer la visite comme des dossiers pédagogiques – chose qui reste assez rare aujourd’hui dans les sites web de musées – pour les enseignants, les étudiants ; ainsi que des lien vers des vidéos à diffuser en classe, avant la visite.
Capture d’écran. Exposition Philippe Starck, dossier pédagogique, page d’accueil.
Le site met donc à disposition une richesse d’informations au profit d’une multitude de publics, permettant une complémentarité avec son espace muséal. Cette quantité d’informations disponibles, uniquement sur le site du musée, renvoie à une stratégie d’adhésion du public qui se familiarise avec l’ensemble des projets du Centre Pompidou. Le Centre Pompidou Virtuel, plus qu’une simple plate-forme de renseignement, devient alors un véritable centre de ressources en ligne. Alain Seban disait à ce propos : « Cette nouvelle plateforme va devenir un vaste centre de ressources ouvert et décloisonné sur l’art moderne et contemporain sans équivalent au monde ».
La programmation, un incontournable
Capture d’écran, Agenda par semaine du site web Centre Pompidou.
La troisième rubrique correspond à l’agenda du musée, répertoriant sur un calendrier les dates des expositions temporaires et tous les autres évènements (cinéma, concerts, ateliers, spectacles, horaires de groupes etc.) qui ont lieu au Centre Pompidou. Ces informations permettent à n’importe quel public (professionnel ou amateur) de planifier tout en simplicité sa visite depuis chez soit, mais aussi de susciter l’envie de découvrir les autres évènements proposés dans le musée.
L’agenda est répartit selon les différents types de publics et toujours en fonction de l’actualité du musée, permettant des recherches croisées et plus précises pour satisfaire toutes les envies. Il comprend par ailleurs de nombreux liens vers les évènements en question contenant des vidéos, biographies et présentations associées. De plus, les tags sur chacune des pages permettent une navigation d’autant plus riche et précise. En prenant l’exemple de l’exposition de Jeff Koons via l’agenda, lorsque l’on clique sur la date du 04 décembre à 15h, l’internaute se retrouve sur la page de présentation de l’exposition. Puis, sur cette page apparaissent les différents tags en rapport avec cette exposition. On retrouve alors, « culture américaine » , « culture populaire », « objet quotidien » etc. Ces différents mots clés sont des liens vers des ressources abordant les oeuvres, artistes, expositions à travers des thèmes beaucoup plus vastes.
La rubrique agenda, bien que peu « originale » aujourd’hui pour un site web de musée, reste essentielle pour les institutions artistiques aux programmations nombreuses et variées. L’agenda en ligne du musée est un atout majeur devenu incontournable aujourd’hui avec le développement des nouvelles technologies (et notamment des Smartphones) et un geste qui est complètement rentré dans les habitudes du public. A cela s’ajoute, on le verra l’intermédiaire des réseaux sociaux.
Capture d’écran. Recherche de mot clé « culture américaine », lien vers des ressources associées.
Pour prolonger l’expérience
Enfin, la quatrième et dernière rubrique est celle de la boutique en ligne. Annexe à la fameuse boutique du Centre Pompidou, elle propose une série d’articles, se présentant comme une véritable boutique en ligne : librairie, papeterie, mode et accessoire, décoration, multimédia etc. Cette dernière section « multimédia » offre la possibilité, via le lien « app store » , de télécharger des applications pour iphone ou ipad sur des artistes et/ou expositions du Centre Pompidou. Ces applications développées par le musée contiennent un catalogue d’exposition ainsi que des informations sur l’artiste/thème de l’exposition. Cela permet alors aux spectateurs de retrouver les oeuvres observées lors des visites directement sur son téléphone ou sa tablette et ainsi de prolonger l’expérience de la visite ou encore d’approfondir ses connaissances.
Capture d’écran. Exemple application, Roy Lichtenstein, boutique en ligne Centre Pompidou, Itunes store.
Le site web du Centre Pompidou, présenté ici dans son ensemble, est donc porteur d’informations supplémentaires pour le spectateur, il complète sa visite en dehors du musée, lui permet d’accéder à certaines des oeuvres du centre depuis chez lui, dans n’importe quelle partie du monde. Au total, il offre la possibilité d’accéder à 95.000 ressources numériques tous supports confondus. Son identité visuelle est très simple, basée sur le graphisme du logo du centre, elle privilégie les lignes horizontales, une palette de couleurs restreinte. Néanmoins, à la suite de cette étude sur le contenu détaillé du Centre Pompidou virtuel, il serait bon de se demander si le site répond vraiment au prérogatives énoncées en 2012 par Alain Seban lors de son lancement. D’autre part le site, aussi riche soit-il, correspond-t-il vraiment aux attentes actuelles de ses visiteurs ?